Pleins feux sur les collègues vacataires en situation de précarité : compte-rendu du CA du 26 mai 2023

Les pieds dans le plat : précarité et inégalités de traitement des collègues vacataires

Résistons ! interpelle régulièrement la présidence sur les plus précaires d’entre nous, BIATOSS ou personnels enseignant·es, et a demandé à plusieurs reprises où en était l’état d’avancement de la mensualisation des collègues vacataires dans notre université, ou encore s'est fait l’écho de leurs difficultés à se faire rembourser leurs frais de transport. Lors de ce CA, vos élu·es ont relayé deux revendications complémentaires. Elles et ils ont sollicité la présidence sur les suites que Paris 8 envisageait de donner, d’une part, à la plateforme de revendications des collègues vacataires de Paris 8, partie prenante du mouvement national du collectif des vacataires dont une tribune a été publiée dans Le Monde du 4 avril dernier et, d’autre part, à une motion émanant des départements de l’UFR Textes et Sociétés réclamant de mettre fin aux inégalités de traitement dont les vacataires sont victimes dans certaines UFR.

Des collègues payés en dessous du SMIC horaire. Les élu·es Résistons ! relaient les revendications du collectif des vacataires qui a adressé à la Présidente de Paris 8 une lettre ouverte demandant : 1. Doublement de la rémunération de l'heure de vacation, actuellement sous le SMIC horaire, l’heure de TD correspondant à 4,2 heures de travail effectif ; 2. Effectivité de la mensualisation afin de limiter la précarité et le recours aux aides sociales ; 3. Allègement des dossiers administratifs à fournir, véritable parcours du combattant et charge de travail à part entière ; 4. Accès au remboursement des frais de transport et aux avantages statutaires : cartes professionnelles, accès aux restaurants universitaires, aux bibliothèques…

La présidente indique prendre au sérieux la précarité des vacataires. Toutefois, elle regrette que le mail reçu le 17 mai dernier ne mentionnait aucun nom de personne à contacter alors même que le texte a été publié quelques jours plus tard sous la forme d’une lettre ouverte l’interpellant directement. Elle s’engage cependant à recevoir des représentants du collectif dès qu’elle disposera d’interlocuteurs identifiés. Puis les principaux points de revendication sont passés en revue. Concernant le doublement du montant de l’heure de vacation dont la tribune du Monde indique que cette mesure représente moins d’un pour cent du budget des universités, la présidente signale qu’à Paris 8, les vacations totalisent davantage et que l’université n’a, de fait, pas les moyens suffisants pour honorer une telle revendication. Rappelons que le montant de l’heure de vacation est indexé sur le point d'indice de la fonction publique et non sur le SMIC, d’où sa faiblesse et sa dévaluation au fil des années…

La veille du CA, lors de la réunion de France Université, les président·es ont interpellé Sylvie Retailleau sur les revendications des vacataires. Cette dernière a botté en touche en rappelant, semble-t-il assez violemment, d’une part, la réglementation concernant la mensualisation et, d’autre part, que la grande majorité des vacataires ont un emploi principal. Autrement dit, pour la Ministre, il n’y a pas de sujet. Selon la présidente, l’injonction à mensualiser les vacataires inscrite dans la LPR s’est opéré sur des universités déjà sous pression. Une des clefs de progression réside dans la déclaration régulière du service fait, lequel déclenche la mise en paiement, comme les élu·es Résistons ! l'ont déjà précisé dans plusieurs compte-rendu antérieurs. À ce propos, la présidente regrette l’inégal empressement des différents personnels à valider les services faits, lesquels varient au demeurant selon les UFR (RAF dans certains cas, responsables ou secrétaires de formation dans d’autres, parfois responsables d’années), ce qui ne facilite pas les choses. Par ailleurs, de qui parle-t-on lorsqu’on évoque les vacataires, s’interroge-t-elle ? D’agents titulaires ou contractuels de la fonction publique ? de salariés du privé ? d’intermittents du spectacle ? de doctorants non financés ou en fin de contrat ? Les situations de précarité évoquées ne concernent à l’évidence pas l’ensemble des vacataires ou pas de la même façon…

Les services répondent ensuite sur des points plus techniques : concernant la lourdeur des pièces justificatives, l’université respecte intégralement la circulaire ministérielle et la seule piste d’amélioration concerne les contrôles réalisés sur les artistes auteurs et les professions libérales qui peuvent s’exercer a posteriori et non plus a priori. Tant mieux pour les personnes concernées, mais ça ne fait pas beaucoup avancer les choses pour les doctorant·es en galère ! Sur les frais de transport, il faut faire remonter les dossiers et les avantages afférents au statut d’enseignant à Paris 8 semblent négociables. Rappelons ici que Résistons souhaiterait que davantage de thèses soient financées, ce qui réduirait mécaniquement les problèmes de précarité auxquels est confrontée une partie des vacataires.

Des inégalités de traitement problématiques. Résistons ! relaie également la motion des départements de l’UFR Textes et sociétés qui demande que l’Université mette fin à la discrimination dont sont victimes les collègues vacataires au sein de l’UFR. En effet, un même service d’enseignement dans les maquettes de formation – un CM-TD de 48 heures équivalent TD – disposant du même intitulé dans les brochures et du même code Apogée, est rémunéré sur la base des heures de présence face aux étudiant·es, soit 39h, pour les collègues vacataires et sur la base des maquettes de formation, soit 48h pour les titulaires, les ATER et les doctorants bénéficiant d’un contrat doctoral. A cela vos élu·es font état d’une seconde inégalité, entre UFR cette fois, voire entre départements au sein d’un même UFR puisque là où les uns font des discriminations, les autres n’en font pas sans pour autant que le statut des vacataires (chargé·es d’enseignement vacataires ou agent·es temporaire vacataire) permette d’expliquer les différences identifiées. Bref, on trouve toutes sortes de configurations que l’on ne détaillera pas ici et qui interrogent.

La présidente, un peu embarrassée, reconnait qu’il existe une disparité ancrée dans les composantes autour du paiement des vacataires sur la base des heures maquettes ou des heures en présentiel. Elle se montre, comme beaucoup, attachée au format CM-TD et craint d’ouvrir une boîte de Pandore… Nous tombons néanmoins d’accord pour affirmer que l’augmentation du recours aux vacataires traduit, comme le souligne la tribune du Monde, l’insuffisance des postes de titulaires pour assurer les enseignements prévus dans les maquettes de formation et faire face à la croissance étudiante.

Des répercussions en chaîne. La présidente et le VP CA souscrivent à l’analyse des élu·es Résistons ! qui attirent leur attention sur les répercussions en chaîne que la situation des vacataires engendre dans certains départements et UFR : au-delà de la rétention des notes et de ses conséquences, c’est l’alourdissement de la charge de travail des collègues responsables de formation qui peinent de plus en plus à recruter des vacataires et c’est la perspective d’une rentrée universitaire dégradée.

Un début de remise en ordre au sein de l’UFR de psychologie, suite au rapport de l’inspection générale de l’ESR

De graves dysfonctionnements : souffrance au travail, pratiques s'apparentant à du harcèlement, phénomène d'emprise… La révision des statuts de l’UFR de psychologie est présentée aux élu·es, par la DGS, comme une première réponse, organisationnelle, aux conclusions de l'enquête de l'Inspection générale (IGESR) qui s'est déroulée au cours du second semestre 2021-2022 et au début du premier semestre 2022-2023. Le rapport de l'IGESR a été transmis à la Direction en janvier dernier et les résultats de l'enquête ont été transmis à l'oral à la Formation Spécialisée en matière de Santé, de Sécurité et de Conditions de Travail (FS-SSCT) ainsi qu'aux collègues de l'UFR. L’enquête, qui repose sur l’audition de 80 personnes, a été diligentée en partie pour répondre à une alerte de danger grave et imminent (DGI) suite à de nombreux dysfonctionnements constatés au sein de l’UFR : faits de violence, souffrance au travail, dysfonctionnements graves, processus mafieux… Il est fait état d’une prise de pouvoir effectif, depuis une dizaine d'années, par un petit cercle auteur de malversations constatées (des primes distribuées en liquide) à l’origine de liens de subordination identifiés. Le rapport de l’IGESR pointait que les statuts de l'UFR, élaborés en 2012, participaient d’une absence de collégialité favorisant les dysfonctionnements constatés. C’est la raison pour laquelle leur révision a été entreprise. La DGS fait état d’un travail réalisé par elle-même et l’administrateur provisoire de l’UFR en collaboration avec les membres du conseil d'UFR : la proposition initiale a fait l’objet d’aller-retours, a été amendée et les statuts soumis au CA ont été adoptés à une large majorité des voix par le conseil d’UFR.

La responsabilité de la prévention des risques psycho-sociaux incombe à l’employeur. Les élu·es Résistons ! soulignent la gravité des dysfonctionnements constatés [L'IGESR a saisi le procureur afin que des suites pénales soient engagées] et rappellent que l'alerte sur la souffrance au travail vécue par des collègues de cette UFR ne date pas de hier mais de 2014 et qu’elle est documentée dans les comptes rendus du CHSCT depuis 2017. Elles et ils demandent pour quelles raisons les alertes successives n’ont pas fait l’objet d’une prise en charge plus précoce, s’inquiètent de problèmes voisins dans plusieurs autres UFR ou services et rappellent que l’employeur a la responsabilité de la prévention des risques psycho-sociaux à l’université comme ailleurs. Il leur est répondu qu’un diagnostic global est en cours sur les risques psychosociaux en collaboration avec l’Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail (ARACT) et qu’il faut laisser l’instance compétente qu’est la FS-SSCT (laquelle a remplacé le CHSCT depuis les élections professionnelles de décembre dernier) traiter ce type de situation. Nous insistons sur l’obligation de l’employeur à prévenir ce type de risques, lesquels ne relèvent plus de la prévention lorsqu’ils sont mis à l’ordre du jour de la FS-SSCT.

Des problèmes loin d’être entièrement résolus. Sur les statuts eux-mêmes, les élu·es Résistons ! interrogent l’ampleur d’une concertation limitée aux seuls membres du conseil en place, ce à quoi il est objecté que le périmètre de concertation a de fait été beaucoup plus large que les seuls membres statutaires du conseil en raison des nombreux invités. Ils pointent aussi le paradoxe de statuts censés réduire la concentration du pouvoir tout en prévoyant la possibilité de réunions en visioconférence dont l'usage montre qu’elles favorisent la défection des participant·es et donc cette même concentration du pouvoir qu’ils sont censés réduire. Il est répondu que ce point a été largement débattu au sein du conseil d’UFR dont les membres ont refusé d’en faire une règle, les nouveaux statuts encadrant la possibilité d’y recourir. Bref, la direction est satisfaite du travail réalisé. Vos élu·es, eux, sont plus dubitatifs et font état d’une situation qui reste préoccupante au sein de cette UFR : les problèmes relevés par le rapport de l’IGESR sont loin d’être résolus, les syndicats venant d’être à nouveau alertés sur des pratiques problématiques.

Où est le loup ? Reconfiguration de l’usine à gaz Paris Lumières

Vers une convention de coordination territoriale ? La présidente nous informe d’une possible évolution de la COMUE. Le CNRS a annoncé qu’au terme du contrat d'établissement, en 2025, il quitterait la COMUE Paris Lumières dès lors qu’elle n’a pas débouché sur une fusion afin de recentrer sa relation avec les universités sur les seules UMR. Le Président de Nanterre a proposé de réfléchir à une nouvelle forme de coopération : une convention de coordination territoriale, format souple qui existe depuis 2018 et qui permettrait de pallier l’insuccès répété des candidatures conjointes à des appels à projets européens indexés sur la transformation des établissements. La convention de coordination territoriale mettrait Paris 8 et Nanterre à l'abri de ce type de déboire. De plus, lors de la réunion de France Université du 26 mai dernier, la ministre de l’Enseignement supérieur a longuement évoqué l’évolution des COMUE en précisant que le maintien de l'existant ne pouvait être que résiduel.

La présidente signale un engouement pour les établissements expérimentaux, au nombre de 38 à ce jour, chez beaucoup de ses collègues. On rappelle que les établissements expérimentaux sont un miroir aux alouettes dérogatoires du code de l’éducation qui préfigurent la privatisation de l’ESR. La principale différence entre une convention de coordination territoriale et l’actuelle COMUE concerne la gouvernance : il n'y aurait plus de conseil d’administration, ni de présidence, ni de site Paris Lumières et les projets portés seraient rattachés à l'une des deux universités tandis que les moyens alloués seraient répartis au prorata des investissements de chacune. Le Ministère assure le maintien de l'ensemble des postes de la COMUE pour les deux établissements principaux, lesquels devront se les répartir.

Moins de bureaucratie, maintien des postes : où est le loup ? interrogent vos élu·es. Pour la présidente, le loup se trouve dans la répartition des projets en cours entre les deux universités (PIA-3 et PIA-4 sur la formation continue et l'apprentissage avec 20 postes de ressources humaines à repositionner. Concrètement, la COMUE gère trois projets à se répartir entre les deux universités. S’il semble évident que l’EUR ArTeC sera située à P8 qui l'a élaborée et portée depuis le début, le NCU So Skilled relève davantage de Nanterre bien que ce soit P8 qui le porte actuellement et qui l’a le plus investi. En dépit de son rapport distant à ce projet, Nanterre souhaite en conserver le pilotage. Le troisième projet, qui vient d’être obtenu par le président du conseil académique de la COMUE (rattaché à Nanterre) et dont la direction formation de Paris 8 est une cheville ouvrière active risque d’être très disputé.

Concernant les budgets, il n’y a pas de craintes à avoir : ce sont des budgets propres avec des directions autonomes. Un autre loup tient à la souplesse de la coopération : celle-ci peut se transformer en inertie alors même que l’intensification de la coopération est requise. Moins de bureaucratie peut se traduire par une attention moins soutenue au nombre et à la solidité des projets, ce qui peut constituer une fragilité. Jusqu'où peut-on intensifier la coopération avec Nanterre tout en étant également partie prenante de projets initiés dans le cadre de Condorcet ?

Et les UMR ? Vos élu·es demandent également si le recentrement du CNRS sur les UMR ne doit pas s’accompagner d’une politique universitaire de renforcement des UMR existantes, voire de constitution de nouvelles UMR communes avec Nanterre ? Engager une réflexion sur les UMR, pourquoi pas ? Les soutenir et les renforcer, bien sûr, répond la présidente.

Vite dit, bien dit

Quatre petites années et puis s’en va. Après quatre années de présence dans nos murs, Florence Housset, la directrice générale des services (DGS) va rejoindre fin juin Sorbonne Université où les syndicats ne se laissent pas plus marcher sur les pieds qu’à Paris 8.

Un petit tour dans le hall d’accueil. La présidente rend hommage à l’exposition des personnels que chacun peut admirer dans le hall d’accueil de Paris 8 : dix artistes y exposent leurs œuvres.

On part de loin : on nous annonce le renforcement du dispositif en matière de prise en charge des victimes de violences sexistes et sexuelles. À suivre !

Si c’est pas mérité ! Pas moins de 16 oraux blancs pour se préparer au grand oral ! Celui-ci a permis à F. Douzet, collègue de l’IFG, de devenir lauréate du premier ERC porté par P8 (2,5 millions d’euros). Pour les curieux de la géopolitique de la datasphère : https://www.editionsladecouverte.fr/geopolitique_de_la_datasphere-9782348060250.

Peut encore mieux faire, c’est-à-dire à un coût nul… La présidente rend hommage à « la mobilisation exemplaire contre la réforme des retraites » – dont on rappelle qu’elle n’est pas encore terminée (on vous donne rendez-vous dans la rue le 6 juin !) – et « aux syndicats qui ont structuré et donné de l'ampleur à un mouvement respectable ». Bigre, que cache cet hommage appuyé ? La mobilisation exemplaire coûte 38 000 euros [évaluation interne] de remise en état des espaces communs des bâtiments B1 et B2. C’est beaucoup moins qu’en 2018 ou que le chiffrage – en millions – des dégâts constatés d’autres universités… Pour l’avenir, le VP CA suggère aux adeptes des graffitis de privilégier l’expression libre et politique sur supports papier. Merci à l'université de fournir des rouleaux de papier et de l'adhésif, sans oublier de donner les consignes pour laisser les affichages en place le temps de la mobilisation...

Résistons !
Vos élu·es CA.