Des élu·es qui travaillent… et les autres !

Motion sur l'accueil des étudiant·es d'Ukraine

Le Conseil d'administration de Paris 8 réuni le 11 mars 2022 a voté à l'unanimité la motion suivante, reprise du Conseil académique qui l'a adopté la veille :

« Le Conseil de l'Union européenne a adopté le 3 mars 2022 la décision d'appliquer la protection temporaire pour des personnes résidant en Ukraine avant le 24 février 2022.

Peuvent bénéficier de la protection partout en Europe :
a) les ressortissant·es ukrainien·nes résidant en Ukraine avant le 24 février 2022 ;
b) les apatrides, et les ressortissant·es de pays tiers autres que l'Ukraine, qui ont bénéficié d'une protection internationale ou d'une protection nationale équivalente en Ukraine avant le 24 février 2022 ;
c) les membres de la famille des personnes visées aux points a) et b).

La France ne s'est pas prononcée quant à l'élargissement de cette procédure, qu'autorise la directive européenne, aux ressortissant·es de pays tiers autres que l'Ukraine, qui étaient en séjour régulier en Ukraine avant le 24 février 2022 et qui sont également victimes de la guerre. Cette ambiguïté veut dire qu'à ce jour, cette protection temporaire européenne s'appliquera en France quasi exclusivement aux ressortissant·es ukrainien·nes mais pas a priori aux autres ressortissant·es (dont de nombreux·ses étudiant·ees), victimes de la guerre en Ukraine.

Par les voix de son CA et de son CAc, l'Université Paris 8 dénonce l'iniquité de cette situation qui de fait suppose que les établissements devraient avoir à opérer des tris entre les étudiant·es victimes de la guerre, qui la sollicitent et la solliciteront. Elle rappelle la vocation universelle de l'accueil universitaire, qui en impose l'inconditionnalité. Elle déplore par conséquent*, d'ajouter aux traumatismes et souffrances consécutives de la guerre, le fait de placer tou·tes les étudiant·es non-ukrainien·nes fuyant la guerre et cherchant refuge en France en situation de non-droit.

Le CA et le CAc de l'Université Paris 8 demandent au MESRI de se porter garant de l'inconditionnalité de l'accueil en élargissant cette protection temporaire à tous les étudiants et toutes les étudiantes victimes de la guerre, sans distinction de nationalité. »

(* Ce passage du texte a été très légèrement remanié ici pour en améliorer la compréhension.)


Quand la compta de l'université souffre de la précarité des vacataires

Le premier gros sujet de ce CA était le rapport de gestion du compte financier 2021, la présentation de celui-ci a été longue et technique, et a été suivie d'une discussion, entre, d'un côté vos élu·es Résistons !, CGT et Dionysoise, et, de l'autre, la direction et les services administratifs qui ont préparé le rapport (les autres élu·es et nommé·es étant, comme à leur habitude, absent·es des débats).

Une bonne partie de la discussion a porté sur les raisons de la sous-exécution du budget (c'est à dire que l'on voit dans les comptes financiers (CF) que les sommes engagées dans le budget initial (BI) puis le budget rectificatif (BR) n'ont pas été entièrement dépensées). Parmi ces raisons, on trouve la lenteur et la complexité de certaines démarches administratives (en réponse, la DGS a expliqué que des travaux de simplification de certaines démarches étaient en cours), mais aussi et surtout un problème de lissage des dépenses sur l'année, qui pour l'instant sont trop concentrées en fin d'année à l'approche de la clôture budgétaire.

Cela est dû à deux causes principales :

  • La première est simplement la gestion de la misère côté recherche notamment. Les budgets des labos notamment étant très limités, on hésite à engager des dépenses sur toute l'année par prudence, puis on se retrouve à la fin de l'année avec le budget à dépenser dans la précipitation, et l'intégralité du budget ne peut pas être dépensée dans les temps.
  • La seconde, et semble-t-il la plus importante source de sous-exécution, concerne non pas les engagements de budget mais la certification de services faits. Cela concerne, entre autres, la mise en paiement des enseignant·es vacataires. Il a été donné comme exemple que les comptes 2021 comprenaient encore des mises en paiement de vacations effectuées en 2019…

Vos élu·es Résistons !, dont la lutte contre la précarité à l'université constitue l'une des principales revendications, ont sauté sur l'occasion de faire constater à tout le monde que la mensualisation des vacataires permettrait donc d'assainir la comptabilité de l'établissement tout en améliorant la situation des plus précaires.

Il a été confirmé qu'il n'y aurait pas d'opposition du côté de la DIPEFAS mais que c'est du côté des composantes (retours des RAF) que ça bloque. Mais avec le passage au logiciel OSE et la possibilité actuelle pour les responsables de diplômes de valider les services faits par les vacataires qui interviennent dans leur diplôme, plus rien n'empêche réellement de certifier les services faits mensuellement. Vos élu·es Résistons ! ont donc insisté sur la priorisation de ce chantier.

L'occasion manquée d'un rapport de force en notre faveur avec nos tutelles

L'EHESS ayant déménagée de ses locaux boulevard Raspail, la Chancellerie des universités de Paris a décidé de mettre l'immeuble en vente. Il s'agit de près de 1900m² de surface sur trois étages dans le 6ème arrondissement de Paris. Le bâtiment principal (plus de 1700m²) est à 60% la propriété de Sorbonne Université et à 40% celle des 11 universités franciliennes, dont Paris 8, en indivision. Il y a donc besoin de l'accord formel de notre université pour autoriser la vente, et cela a été commandé (il n'y a pas d'autres mots) à notre Conseil d'administration par une lettre très directive de la Chancellerie à notre présidente.

Vos élu·es Résistons ! ont commencé par faire remarquer que la vente d'immobilier universitaire, adapté à l'enseignement et à la recherche, alors que nous sommes en cruel manque de locaux est un choix… cocasse. Cela dit, nous n'avons absolument pas dans l'idée de déménager des activités de notre université dans ces locaux. En revanche, nous avons expliqué aux membres du CA que nous avions là une occasion rare d'instaurer un véritable rapport de force avec nos tutelles afin de faire entendre nos revendications en terme de postes et de locaux, ou même de capacité d'accueil en première année, car cette fois encore le Rectorat s'est assis sur les décisions des composantes validées par nos instances démocratiques à ce sujet.

En effet, la propriété en indivision implique que le CA de Paris 8 à lui seul aurait pu bloquer la vente dans un premier temps[1]. En votant d'abord contre, notre université aurait alors pu poser ses conditions pour débloquer le processus : relever le plafond d'emplois, obtenir de nouveaux postes d'EC et de BIATOSS, réintégrer les personnels de nettoyage et de gardiennage sur des postes permanents, construire des nouveaux locaux à Saint-Denis, obtenir des moyens supplémentaires pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, etc. Tant de choses auraient pu être mises sur la table ! Nous avions un atout en main, mais certain·es ont préféré perdre la partie.

Pourtant, notre proposition semblait avoir été entendue par la majorité : la présidence a exprimé à demi-mots son malaise de ne pas pouvoir soutenir l'idée sans se dédire de son vote au CA de la Chancellerie de Paris la veille de notre CA local ; et pour une fois 3 élu·es de la majorité se sont abstenu·es… Malheureusement, cela n'a pas suffit : 3 abstentions, 9 contre, et 13 pour (les 9 contre étant composés des voix de Résistons !, de la CGT, de la Dionysoise, de Solidarité Étudiante, et du Poing Levé).

À 13/12 pour/pas-pour, on n'est pas passés si loin… Les ravages d'avoir un CA composé par une majorité qui sert de chambre d'enregistrement automatique, incapable même de lire entre les lignes des discours de la présidence, annihilant ainsi le travail de l'opposition constructive que nous représentons, sont terribles. En off à la fin du CA, un·e membre de la majorité reconnaît l'intérêt et le sérieux de nos apports au débat, et nous avoue même se sentir « œuvrer à contre-courant » (sic) des intérêts de notre communauté universitaire.

Application locale du R.I.P. EC : la “prime individuelle” remplace la PEDR

Lors de ce CA, il a également été question de la 3ème composante du RIPEC, c'est à dire la prime individuelle qui remplace la PEDR. Cette prime peut varier entre 3500€ et 12000€ annuel sur une durée de 3 ans et la loi prévoit qu'à terme 45% des bénéficiaires potentiel·les touchent cette prime une année donnée. La direction nous a expliqué ne pas être en mesure d'identifier un abondement de budget de la part du Ministère qui permettrait d'honorer ces consignes ; ça ne l'a pourtant pas empêché d'approuver cette prime au mérite par son vote ! On note tout de même la proposition du CAc de fixer la prime à 4000€ annuel pour tout le monde (quels que soient le corps, le grade, et le motif d'attribution) dans notre établissement, dans un souci d'équité et de répartition la plus large possible. Le CAc a également émis l'idée d'établir la liste finale des lauréat·es et la présidence s'est engagée à suivre cet avis. La loi prévoyant de donner les pleins pouvoir à la présidence à la fois sur la liste et les montants, nous saluons l'effort fait localement pour éviter la mise en place d'une barronie et de l'arbitraire portés par l'esprit de la loi.

Repyramidage LPR

La LPR prévoit un repyramidage des corps MCF et PR par promotions locales, avec l'objectif d'atteindre 40% de PR d'ici 2026 (contre ~31% actuellement), en tenant compte de la parité de genre, de l'équilibre entre disciplines, et de l'ancienneté (les promu·es doivent avoir leur HDR, et 75% doivent être hors classe, les autres avoir 10 ans d'ancienneté dans le corps des MCF). Paris 8 dispose de 7 possibilités de promotions au titre de 2021 et de 8 au titre de 2022, qui seront opérées en même temps. La loi impose une ouverture par section CNU. Localement, un groupe de travail composé d'élu·es EC des trois conseils centraux s'est réuni pour étudier les vivers de promouvables sur la base des données de la DIPEFAS, et décider des sections concernées pour faire en sorte de correspondre aux critères cités ci-dessus. Les sections retenues sont : 03, 05, 06, 07, 11, 16, et 18 au titre de 2021, et 14, 15, 16, 17, 18, 25, 70, 71 au titre de 2022.

La présidence s'engage par ailleurs à recourir au maximum à des avis extérieurs aux différentes étapes locales de la procédures (la loi prévoyant essentiellement les pleins pouvoirs à la présidence).

Bien que nous soyons contre la LPR et l'idée d'un repyramidage par transformation de supports de postes plutôt que par création de postes alors même que nous manquons de collègues, nous avons choisi de simplement nous abstenir : il ne nous a pas paru pertinent de voter contre la mise en place localement d'une procédure moins pire que ce que prévoit l'esprit de la loi.

En revanche, nous avons fait remarquer que (conformément à la loi), c'est au Comité technique (CT) que ces sujets doivent être discutés et validés, avant leur passage au CA.

Vite fait bien fait

  • Le rapport social unique 2020 de l'établissement nous a été présenté. Il a notamment été porté à notre attention que des mesures prises à Paris 8 semblent avoir un impact positif sur la réduction du recours au temps partiel (2% des BIATOSS chez nous contre 11 à 13% classiquement dans les autres universités semble-t-il), en particulier, la possibilité de répartir ses heures sur 4.5 jours en alternant des semaines de 5 et des semaines de 4 jours jouerait un rôle important. On sait combien cette question est importante dans les luttes féministes, il nous paraît donc pertinent de publiciser cette information.
  • Seules les voix des élu·es Résistons !, CGT, Solidarité Étudiante et Le Poing Levé ont voté contre les capacités d'accueil proposées par le Rectorat pour les premières années de licence et de BUT à la rentrée 2022, bien qu'encore une fois celles-ci ne respectent pas les demandes qui émanent du terrain et qui avaient été validées en CFVU.
  • Nous avons validé les subventions aux projets étudiants via le FSDIE (Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes), qui sont majoritairement des projets artistiques. Un rappel a été fait que cela n'est pas le seul type d'initiatives encouragées.
  • Nous avons validé les subventions aux syndicats de personnels et d'étudiant·es (qui ont même été augmentées par rapport à la proposition initiale lors de la discussion à la demande notamment de la Dionysoise). Ces subventions sont importantes pour l'activité des syndicats étudiants qui n'ont par ailleurs que très peu de ressources propres. La CGT FERC Sup a fait savoir qu'elle n'avait pas besoin de cette subvention patronale mais qu'elle s'en servirait pour soutenir les luttes des travailleur·es que ce soit à Paris 8 ou ailleurs par exemple en abondant des caisses de grève, comme à son habitude.
  • Le bureau de la présidence de l'université a été renouvelé.

Des élu·es qui travaillent… et les autres !

Une fois de plus, la tenue et le déroulé de ce Conseil d'administration révèle que parmi les élu·es des personnel·les de l'université du moins, seul·es ceux et celles des listes Résistons !, CGT, et de la Dionysoise préparent sérieusement les conseils. Les autres membres élu·es et nommé·es du CA (en dehors de la direction de l'université qui préside les séances) n'avaient, comme de coutume, manifestement rien préparé, ils et elles n'avaient aucune question à poser, aucune remarque à faire, et n'étaient là, comme à leur habitude, que pour voter pour tout ce qui est proposé par la direction, transformant ainsi de fait notre CA en simple chambre d'enregistrement. On le sait, mais c'était particulièrement choquant cette fois-ci au vu des enjeux, notamment concernant la vente des anciens locaux de l'EHESS, pourtant arrivée, dans le déroulé de la séance, après les approbations absurdes des LDG (lignes directrices de gestion) inapplicables et des capacités d'accueil désavouant notre démocratie universitaire. C'est pourquoi nous avons choisi de vous en faire part aussi directement.

Vous remarquerez d'ailleurs qu'en plus d'être les seul·es à travailler en amont, nous sommes également les seul·es à proposer des comptes rendus publics, qu'on espère informatifs et utiles !

Tout le prouve : notre démocratie a besoin d'une opposition plus forte. Si comme nous vous en êtes persuadé·es, vous pouvez déjà rejoindre l'une de nos organisations syndicales (CGT, FSU, Solidaires) pour participer à nos débats, aux travaux collectifs, notamment lors de la préparation des conseils.

Vos élu·es CA,
Résistons !

 


[1] : Notre refus aurait bloqué la vente jusqu'à ce qu'on cède (dans le cas où nos revendications seraient satisfaites), ou qu'un ensemble de propriétaires représentant deux tiers de l'indivision saisissent le TGI (tribunal de grande instance) et, qu'au terme de la procédure juridique, ce dernier rende un verdict autorisant la vente malgré notre refus…